lundi 10 juin 2013

Le Concile des méchants

      «Concilium malignantium obsedit me» Ps XXI, 17

Nous voudrions montrer que le XXIe Concile oecuménique, couramment appelé Vatican II, est prédit, et même schématiquement décrit, dans le Psaume XXI de la Vulgate. Ce psaume contient cette singulière locution : "Concilium malignantium obsedit me", qui signifie : le Concile des méchants m'a assiégé. Le psaume et le concile sont ainsi placés sous le même symbole numérique, particularité qui éveille déjà l'idée d'une correspondance.

Le Psaume XXI est l'un des plus anciennement commenté parce qu'il contient, énoncées d'avance par le psalmiste, quelques-unes des "paroles de la Croix". Mais, jusqu'à notre époque, l'expression "concilium malignantium" n'avait pas attiré particulièrement l'attention parce que le Concile qu'elle désigne n'avait pas eu lieu. Les prophéties ne deviennent certaines qu'après leur réalisation.

Ce vénérable psaume fait donc l'objet d'une exégèse classique que non seulement il n'est pas question pour nous de contester, mais qui va nous servir de fondement pour proposer une amplification de son sens traditionnel.

I - L'INTERPRÉTATION CLASSIQUE

Examinons d'abord l'exégèse classique du Ps. XXI, puisque c'est elle qui servira de base à notre interprétation complémentaire :

Empruntons au R.P. Fillion, professeur d'Ecriture Sainte à l'Institut Catholique de Paris dans les années 1900, son jugement très autorisé sur le Psaume XXI.

«Ce psaume a toujours été infiniment cher à l'Eglise. C'est qu'il décrit, avec une beauté et une puissance de langage vraiment insurpassable, d'une part, les plus poignants mystères de la vie du Messie, les humiliations et les souffrances de la Passion ; et d'autre part, le glorieux mystère de Sa Résurrection.

Le doute n'est pas possible sur ce point, car la tradition ecclésiastique est unanime, et elle s'appuie sur plusieurs passages du Nouveau Testament où nous voyons tantôt Jésus-Christ S'approprier Lui-même ce psaume, tantôt les apôtres et les évangélistes Lui en appliquer divers textes. Et l'accomplissement en a été d'une précision si frappante, qu'un ancien a pu écrire que l'on peut regarder ce psaume autant comme une prophétie que comme une histoire : "Ut non tam prophetia quam historia videatur !"

Tous les commentateurs font remarquer que le Ps. XXI se divise en deux parties :

La première prophétise les brutalités qui devaient être infligées au divin Crucifié. Cette première partie constitue un CHANT DE LAMENTATION.

La deuxième partie (du verset 23 jusqu'à la fin) annonce la Résurrection et le Règne du Seigneur en même temps que la gloire de l'Eglise. C'est véritablement un CHANT DE TRIOMPHE.

Cette séparation en deux "chants" d'esprit opposé dans un même psaume a été mise en évidence depuis très longtemps et elle restera donc l'une des bases de notre raisonnement.

Commençons par l'examen de la première partie, celle dont nous venons de dire qu'elle constitue un "chant de lamentation". Les plus antiques commentateurs chrétiens de l'Ecriture Sainte n'ont pas manqué de reconnaître, dans le Ps. XXI, la prophétie de la PASSION PHYSIQUE de Notre-Seigneur, prophétie qui venait de se réaliser sous les yeux  mêmes des Évangélistes et qui prouvait la "messianité" de Jésus de Nazareth.

Nous reproduisons ci-dessous la traduction française de la première partie du Ps. XXI (jusqu'au verset 23). On pourra ainsi y recourir pour situer dans leur contexte les quelques versets que nous citerons à nouveau et que nous commenterons plus particulièrement.

1. Pour la fin, pour le secours du matin, Psaume de David.

2. O Dieu, Mon Dieu, regardez-moi ; pourquoi m'avez-Vous abandonné ? La voix de mes péchés éloigne de moi le salut.

3. Mon Dieu, je crierai pendant le jour, et Vous ne m'exaucerez pas, et pendant la nuit, et l'on ne me l'imputera point à folie.

4. Mais Vous, Vous habitez dans le sanctuaire ; Vous qui êtes la louange d'Israël.

5. Nos pères ont espéré en Vous ; ils ont espéré, et Vous les avez délivrés.

6. Ils ont crié vers Vous, et ils ont été sauvés ; ils ont espéré en Vous, et ils n'ont point été confondus.

7. Mais moi, je suis un ver, et non un homme ; l'opprobre des hommes, et le rebut du peuple.

8. Tous ceux qui m'ont vu se sont moqués de moi ; de leurs lèvres ils ont proféré l'outrage, et ils ont branlé la tête.

9. Il a espéré au Seigneur, qu'Il le délivre ; qu'Il le sauve, puisqu'Il l'aime.

10. Oui, c'est Vous qui m'avez tiré du ventre de ma mère ; Vous êtes mon espérance depuis le temps où je suçais ses mamelles.

11. Au sortir de son sein, j'ai été jeté sur Vos genoux ; depuis que j'ai quitté ses entrailles, c'est Vous qui êtes mon Dieu.

12. Ne Vous retirez pas de moi, car la tentation est proche, et il n'y a personne qui me secoure.

13. Des jeunes taureaux nombreux m'ont environné; des taureaux gras m'ont assiégé.

14. Ils ont ouvert leur bouche sur moi, comme un lion ravisseur et rugissant.

15. Je me suis répandu comme l'eau, et tous mes os se sont disloqués. Mon cœur est devenu comme de la cire fondue au milieu de mes entrailles.

16. Ma force s'est desséchée comme un tesson, et ma langue s'est attachée à mon palais ; et vous m'avez conduit à la poussière du tombeau.

17. Car des chiens nombreux m'ont environné ; une bande de scélérats m'a assiégé. Ils ont percé mes mains et mes pieds.

18. Ils ont compté tous mes os. Ils m'ont considéré et contemplé.

19. Ils se sont partagé mes vêtements, et ils ont jeté le sort sur ma tunique.

20. Mais Vous, Seigneur, n'éloignez pas de moi Votre secours ; prenez soin de ma défense.

21. Délivrez, ô Dieu, mon âme du glaive, et mon unique du pouvoir du chien.

22. Sauvez-moi de la gueule du lion, et sauvez ma faiblesse des cornes des licornes.

Commençons par énumérer les passages du Psaume XXI qui prophétisent les diverses phases du Sacrifice du Calvaire.

Réduisons-nous aux quatre versets les plus caractéristiques : les versets 2, 7, 16 et 19.

Verset 2. Après l'intitulé qui est constitué par le premier verset, c'est le verset 2 qui est le véritable début du psaume. C'est lui qui contient l'exclamation fameuse de Notre-Seigneur qui fut sa dernière parole sur la Croix avant de rendre l'esprit : «Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'avez-Vous abandonné ?»

Le choix de ce passage, par Notre-Seigneur, dans un moment aussi solennel nous invite à considérer tout l'ensemble du psaume avec la plus grande attention. Il s'agit incontestablement d'un psaume privilégié.

Verset 7. «Mais moi je suis un ver et non un homme...»

Ici rien de particulier n'est annoncé mais l'Écrivain sacré synthétise l'ensemble des humiliations dont le
Rédempteur est l'objet depuis Son arrestation jusqu'à Sa mort. Il ne s'agit pas d'un Messie triomphant, mais d'un Messie souffrant.

Verset 16. «... ma langue s'est attachée à mon palais...»

Le psaume fait ici allusion à la terrible soif des crucifiés qui se manifeste par une sécheresse extrême de la gorge. Un autre psaume est encore plus précis dans la prédiction : «... et dans ma soif, ils m'ont abreuvé de vinaigre» (Ps. LXVIII, 22).

Lorsque Notre-Seigneur a prononcé Son célèbre "sitio", J'ai soif, il avait en vue l'accomplissement des Ecritures à Son sujet, comme l'évangéliste saint Jean le fait remarquer : «Après cela, Jésus sachant que désormais tout était accompli, dit, afin que l'Ecriture soit accomplie : J'ai soif». (Jean XIX, 28) C'est alors qu'on Lui présenta une éponge imbibée de vinaigre.

On voit que ces deux psaumes associés (21 et 68) avaient prophétisé cet épisode devenu si célèbre depuis qu'il a été réalisé.

Verset 19. «Ils se sont partagé mes vêtements et ils ont jeté le sort sur ma tunique».

Cet épisode, si caractéristique lui aussi, après avoir été prédit par le psaume XXI, est rapporté historiquement par saint Marc, par saint Luc et surtout par saint Jean (XIX, 23-24) qui est le plus complet et le plus explicatif :

«Quand les soldats eurent crucifié Jésus, ils prirent Ses vêtements, dont ils firent quatre parts, une pour chaque soldat, et aussi Sa tunique. Or la tunique était sans couture, toute d'un seul tissu depuis le haut. Ils se dirent donc les uns aux autres : Ne la déchirons pas, mais tirons au sort à qui elle sera. C'était pour que s'accomplit cette parole de l'Ecriture : ils se sont partagé Mes vêtements, et ils ont tiré Ma robe au sort. C'est ce que firent les soldats».

Tels sont les quatre principaux passages du Ps. XXI qui prophétisent la crucifixion du Juste avec le plus de précision.

Cependant, ce même psaume contient d'autres passages, indubitablement prophétiques eux aussi, mais dans lesquels la précision est beaucoup moindre.

Nous voulons parler des quatre autres versets 13, 14, 17 et 21. On a pu les rapporter à la Passion physique du Christ sans trop solliciter le texte. Il y a là une première interprétation communément admise et que nous allons mentionner dans un instant. Voici, tout d'abord, ces passages :

Verset 13. «De jeunes taureaux nombreux ("vituli" dans le texte) m'ont environné ; des taureaux gras ("tauri" dans le texte) m'ont assiégé».

Verset 14. «Ils ont ouvert leur bouche sur moi, comme un lion ravisseur et rugissant».

Verset 17. «Car des chiens ("canes" dans le texte) nombreux m'ont environné ; une bande de scélérats
("concilium malignantium" dans le texte) m'a assiégé».

Verset 21. «Délivrez O Dieu, mon âme du glaive, et mon unique ("unicam meam" dans le texte) du pouvoir du chien».

Voyons d'abord quelle est l'interprétation classique de ces quatre versets. Nous l'emprunterons au R.P. Fillion.

Ces versets tracent, dit-il, un vivant tableau des ennemis du Messie et de leur cruauté. "Vituli" désigne des taureaux jeunes et "tauri pingues" ("les forts de Basan" dans les Septantes) désignent des taureaux nourris sur les gras pâturages de la Province de Basan, située au pied de l'Hermon où le Jourdain prend sa source, dans la partie nord-est de la Palestine. Ces animaux, à demi sauvages, ont coutume de se ranger en cercle autour de tout objet nouveau ou extraordinaire, et pour peu qu'il les excite, ils l'assaillent à coups de cornes.

Quant aux chiens ("canes") du verset 17, ils représentent, toujours selon le R.P. Fillion, interprète de l'Ecole, la foule cruelle qui assista aux procès de Jésus, suivit le cortège jusqu'au Golgotha et observa longuement le Christ agonisant. Tous ces gens se comportaient comme des chiens faméliques qui errent la nuit dans les villages de l'Orient.

Dans le prolongement de cette même signification, l'expression "concilium malignantium" du verset 17 désigne, selon Fillion et beaucoup d'autres interprètes, une "bande de scélérats" sans pitié, acharnée à faire souffrir et à humilier le Juste.

Passons au verset 21 : «Délivrez mon unique du pouvoir du chien».

Fillion traduit "mon unique" comme désignant "la vie temporelle", en donnant pour motif qu'une fois perdue, la vie ne se remplace pas et que, par conséquent, elle est "unique". Mais alors, si suivant Fillion, on traduit "mon unique" par "ma vie temporelle" ou, comme d'autres, par "mon âme", on ne comprend pas très bien le sens de l'exclamation de Notre-Seigneur.

Nous allons donner plus bas une tout autre interprétation à ces deux mots "unicam meam".

Dans ce système interprétatif, qui est couramment accepté, on considère les "Vituli", les "Tauri" et les "Canes" comme des ennemis de Notre-Seigneur exerçant leur hostilité sur le théâtre même du Calvaire, ce qui est d'ailleurs en partie justifié par le texte : "circumdederunt ME", "super ME os suum". Le pronom ME désigne évidemment la personne du Christ. Il est donc certain que l'exégèse classique est tout à fait acceptable. Nous disons seulement qu'elle ne rend pas tout le sens du texte et que l'on peut valablement la compléter.

II - PROPHÉTIE DE LA PASSION MYSTIQUE DE L'EGLISE

Il nous semble, en effet, que les quatre versets 13, 14, 17 et 21 s'appliquent non seulement à la Passion
physique du Verbe Incarné mais aussi à la Passion mystique de l'Eglise.

Nous pensons que les lamentations du Crucifié, prophétisées dès le temps de David par le Ps. XXI, ne se rapportent pas seulement aux avanies, sévices et brutalités qui ont été infligées à la personne de Jésus-Christ. Ces mêmes lamentations s'étendent également aux épreuves que doit subir l'Eglise contemporaine du XXIe Concile. Et cela parce que cette Eglise, proche de la fin des temps, est l'objet d'une éclipse apparente, véritable mort physique que les Églises des époques précédentes n'ont pas eu à subir.

Il est logique de penser que si l'Eglise des Gentils apparaît dans la partie triomphale du psaume, comme nous le verrons dans quelques instants, rien n'interdit de reconnaître aussi sa présence dans les lamentations, dès lors que le texte y incline.

Mais alors quelques termes latins de la Vulgate vont recevoir une interprétation plus large que celle qui est communément reçue. Les assaillants du Christ en Croix vont devenir aussi des assaillants de l'Eglise. Nous allons devoir donner un nouveau sens aux termes (surtout les taureaux et les chiens) qui désignent ces assaillants de l'Eglise.

Voici les nouvelles significations qui nous paraissent expliquer le plus clairement le texte.

1 - Examinons d'abord quelle est la signification qu'il convient de donner à "vituli" et à "tauri pingues".

Quels sont ces taureaux, jeunes ou adultes, dont il est question aux versets 13 et 14 ?

Ils désignent des hommes en rapport avec l'offrande des sacrifices, que ce soit les sacrifices figuratifs de l'Ancienne Loi ou que ce soit, dans la Nouvelle Loi, le Sacrifice du Divin Rédempteur. Ces animaux figurent des prêtres car les prêtres sont institués dans la nouvelle comme dans l'ancienne Loi, pour offrir la victime.

Le taureau est l'animal emblématique du sacerdoce parce que le taureau est le plus imposant des animaux que l'on peut présenter comme victime. Le taureau ailé est l'animal emblématique de saint Luc dont l'Évangile nous présente plus spécialement Jésus-Christ comme exerçant son ministère de Pontife Universel. Le taureau est l'emblème sacerdotal. Les "jeunes taureaux", vituli, représentent les prêtres. Les "taureaux forts", tauri pingues, représentent les évêques qui sont revêtus de la plénitude du sacerdoce.

Demandons-nous maintenant quel rôle jouent les taureaux dans les versets 13 et 14 où ils sont nommés. Ce rôle est double. On nous dit qu'ils "assiègent", et aussi qu'ils "ouvrent la bouche".

D'abord ils assiègent. Deux verbes décrivent cette action : "circumdederunt" et "obsederunt". Ce sont deux verbes qui ont à peu près la même signification. Ils veulent dire tous les deux "investir" au sens fort, c'est-à-dire en accomplissant jusqu'au bout l'action exprimée par le verbe. Ils signifient donc tous les deux : envahir, occuper ce que l'on a préalablement encerclé et investi(1).

Mais les "vituli" et les "tauri pingues" ne se contentent pas d'assiéger et d'occuper. On nous dit aussi : "Ils ont ouvert la bouche contre moi". Contre moi, c'est-à-dire contre le Christ, au Prétoire d'abord, puis au Calvaire.

Mais ils "ouvrent la bouche" aussi, bien des siècles plus tard, contre l'Eglise, laquelle était donc destinée à souffrir par les prêtres du nouveau Sacerdoce comme le Christ a souffert par les prêtres du Sacerdoce d'Aaron.

Comment ouvrent-ils la bouche ? Les taureaux, jeunes ou vieux, c'est-à-dire prêtres ou évêques, sont déclarés rugir comme des lions. Cela veut dire qu'ils parlent fortement avec l'intention d'être écoutés et obéis. Mais il ne suffit pas à ces lions de rugir. Ce sont aussi des lions rapaces (rapiens), des lions qui dévorent la proie contre laquelle ils ont d'abord rugi. Ils parlent mais ils veulent aussi s'approprier.

Comment ne pas reconnaître, dans ce verbalisme, dans cet investissement et cette occupation, la prodigieuse activité parasite de tous ces conciliabules d'experts, prêtres et évêques, qui ont entouré le Concile Vatican Il et qui ont fini par s'en rendre maîtres (circumdederunt). Nous ne parlons pas des commissions régulières, mais des séances du Concile en vue de peser sur ses décisions. Ces conciliabules ont été à ce point "pontifiants" que les éditorialistes du moment leur ont donné d'un commun accord le nom de PARA-CONCILE.

2 - Considérons maintenant les "canes" du verset 17. Ceux-là ne sont pas des prêtres. Ce sont des laïques. Le texte nous dit d'abord qu'ils ont entouré le Juste (circumdederunt me). Mais ils font beaucoup plus que L'entourer. Ils constituent autour de Lui, comme nous le suggère fortement le psalmiste, une assemblée délibérante qui l'assiège : "CONCILIUM MALIGNANTIUM OBSEDIT ME". Le concile des méchants M'a assiégé. Il assiège le Christ au Golgotha c'est certain, mais il assiège aussi l'Eglise à Vatican II.

Car la locution "concilium malignantium" est visiblement superlative. Elle désigne, certes, la foule informelle qui suit le Christ au Calvaire. Mais ne désigne-t-elle pas avec plus de justesse encore, ces assises organisées et prolongées que l'on a appelées le "para-concile".

Les "canes" laïques, en effet, sont venus grossir les rangs et la force du para-concile. Ces chiens représentent globalement tous les agents médiatiques, tous les "observateurs" maçonniques, soviétiques, juifs, musulmans ou orientaux qui ont tourné autour du Concile avec mission de peser sur lui dans le sens du syncrétisme et de ravaler la Religion du Verbe Incarné au rang "des grandes confessions" qui doivent se partager le monde, dans le PLURALISME.

Concile et Para-Concile ont positivement fusionné. Ils ont réalisé ensemble un véritable bicamérisme. Il n'y eut de fait qu'un seul Parlement religieux, avec deux chambres, où les mêmes sujets ont été débattus. Une "Chambre basse" lançait les idées de réforme et une "Chambre Haute" entérinait les plus "opportunes". C'est ce Parlement assiégé et envahi que le psalmiste nous désigne sous le nom de "Concilium malignantium".

3 - Le verset 21, placé sous le même signe numérique que le psaume lui-même et que le Concile, va nous permettre de confirmer l'ensemble de cette interprétation.

Le Crucifié demande à Dieu de délivrer Son âme du glaive et Son unique du pouvoir des chiens : «Erue a framea, Deus, ANIMAM MEAM et de manu canis UNICAM MEAM».

Les interprétateurs modernes font preuve d'un certain embarras, surtout pour trouver un sens à "unicam meam", qu'ils traduisent par "ma vie temporelle", traduction qui n'est pas très satisfaisante, nous l'avons vu.

Et pourtant il existe une très ancienne interprétation qui paraît beaucoup plus judicieuse et dont nous trouvons une expression particulièrement autorisée sous la plume de Boniface VIII. Le 18 novembre 1302, le Pape Boniface VIII adresse au Roi de France, Philippe IV, la Bulle connue depuis sous le nom de "Bulle Unam Sanctam". Le Pape réunit des arguments pour montrer au Roi de France que la tête de l'Eglise ne saurait être double pas plus que son chef, le Christ, n'est double. L'Eglise représente le corps mystique du Christ et elle est unique. Voici comment s'exprime Boniface VIII :

«Nous devons reconnaître une seule Eglise, sainte, catholique et apostolique. Hors de cette Eglise, il n'y a pas de salut ni de pardon pour les pécheurs... Elle représente un seul corps mystique, duquel corps le Christ est la tête, mais Dieu est la tête du Christ. En laquelle Eglise, il y a un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême».

Le Pape va évidemment soutenir son affirmation par les citations scripturaires que l'on avance généralement quand on veut prouver la "Note d'Unité". Il va d'abord rappeler l'unité de l'arche de Noé:
«... A l'époque du Déluge, il y eut une seule arche de Noé, préfiguration de l'Eglise unique et tout ce qui était en dehors d'elle sur la terre fut détruit».

Puis Boniface VIII invoque le psaume XXI et son verset 21 :

«Nous vénérons aussi l'Eglise comme unique car le Seigneur a dit à son prophète (mis ici pour "psalmiste") : «O Dieu, arrachez mon âme au glaive et MON UNIQUE à la main du chien». (Ps. XXI, 21).

Ne voulant négliger aucune preuve de l'unité de l'Eglise le Pape continue :

«Il a prié en effet pour Son âme, c'est-à-dire pour Lui-même, à la fois tête et corps, parce que l'UNIQUE désigne ici le corps, c'est-à-dire qu'Il a nommé l'Eglise, à cause de l'unité de l'époux, de la foi, des sacrements et de la charité de l'Eglise. Celle-ci est la TUNIQUE sans couture du Seigneur qui ne fut pas partagée, mais tirée au sort. Cette EGLISE, une et unique, n'a qu'un seul corps, une seule tête, et non deux têtes comme si elle était un monstre, c'est-à-dire le Christ et le vicaire du Christ, Pierre et le successeur de Pierre».

Il ne fait donc aucun doute que, pour Boniface VIII, l'expression "unicam meam" du verset 21 désigne l'Eglise. Et cette interprétation lui semble suffisamment assurée pour qu'il en fasse une preuve scripturaire dans un raisonnement théologique particulièrement important puisqu'il s'agit de défendre les prérogatives du Saint Siège.

Nous voilà donc confirmés dans l'orientation que nous avons donnée à notre exégèse : dans la première partie du Ps. XXI (celle dont nous avons dit qu'elle était un "chant de lamentation"), il n'est pas déplacé de voir, derrière la prophétie majeure de la PASSION PHYSIQUE de Notre-Seigneur, la prophétie mineure de la PASSION MYSTIQUE de l'Eglise.

Ainsi le "CONCILIUM MALIGNANTIUM" du verset 17 peut sans difficulté être considéré comme un épisode paroxystique de la Passion de l'Eglise. Il s'en suit que c'est bien le Concile Vatican II, 2le Concile œcuménique, qui est désigné dans le 21e Psaume, par les termes de "Concile des Méchants".

Rien d'étonnant à ce que ces fruits soient si amers.

III - UNE GRANDE ESPÉRANCE

Jésus donc, dans le Psaume XXI, demande la délivrance pour "Son unique" c'est-à-dire Son corps mystique, Son Eglise. Cette délivrance va précisément nous être décrite dans la deuxième partie de ce même psaume.

A partir du verset 23 jusqu'à la fin, nous assistons au TRIOMPHE du Christ sur tous les ennemis dont il a été question jusqu'alors. Et C'EST AUSSI LE TRIOMPHE DE L'EGLISE, laquelle est explicitement évoquée au verset 26 : «Apud te laus mea in ECCLESIA MAGNA ...» «Je vous adresserai ma louange dans une grande assemblée».

Les dix derniers versets du Psaume XXI nous apportent une grande espérance et une grande consolation, nous qui sommes plongés dans le sillage grandiloquent, tumultueux et catastrophique du "Concilium malignantium". Les lamentations du Crucifié se sont changées, d'un seul coup, en un chant de gloire pour Lui et pour Israël. Nous pouvons penser qu'il en sera de même pour son "Unique".

Le Psaume XXI invite à espérer que la douloureuse éclipse de l'Église au temps du XXIe Concile, fera place à un beau rayon de soleil.

Pour le bien comprendre il faut se souvenir que l'Église constitue "l'Israël du Nouveau Testament".

APPENDICE

1 - Reproduisons maintenant les dix derniers versets du Psaume XXI dont on aura ainsi le texte complet :

23. J'annoncerai votre nom à mes frères ; je vous louerai au milieu de l'assemblée.

24. Vous qui craignez le Seigneur, louez-Le : toute la race de Jacob, glorifiez-Le.

25. Que toute la race d'Israël Le craigne, parce qu'Il n'a pas méprisé ni dédaigné la supplication du pauvre, et qu'Il n'a point détourné de moi Son visage; mais qu'Il m'a exaucé lorsque je criai vers Lui.

26. Je vous adresserai ma louange dans une grande assemblée ; j'acquitterai mes vœux en présence de ceux qui le craignent.

27. Les pauvres mangeront et seront rassasiés, et ceux qui cherchent le Seigneur Le loueront ; leurs cœurs vivront dans les siècles des siècles.

28. Toutes les extrémités de la terre se souviendront du Seigneur et se convertiront à Lui ; et toutes les familles des nations L'adoreront en Sa présence

29. Car le règne appartient au Seigneur, et Il dominera sur les nations.

30. Tous les riches de la terre ont mangé et adoré ; tous ceux qui descendent dans la terre se prosterneront devant Lui.

31. Et mon âme vivra pour Lui, et ma race Le servira.

32. La postérité qui doit venir sera annoncée au Seigneur, et les cieux annonceront Sa justice au peuple qui doit naître, et que le Seigneur a fait.

2 - UNE CONFIRMATION NON NÉGLIGEABLE

Nous avons considéré le Psaume XXI comme énonçant deux prophéties complémentaires, l'une très
anciennement connue relative à la Passion physique de Notre-Seigneur, l'autre nouvellement découverte du fait de sa réalisation récente et concernant la passion mystique de la Sainte Eglise, Son épouse.

Or la position que nous avons prise ainsi reçoit une confirmation de principe, qui est loin d'être négligeable, dans un passage très explicite du "Catéchisme du Concile de Trente".

Les rédacteurs de ce document, qui est revêtu d'une grande autorité doctrinale, ont commenté, les uns après les autres, tous les articles du Symbole de Nicée-Constantinople, l'une des chartes les plus importantes de la Foi.

Quand ils en arrivent à l'article "Je crois à la Sainte Eglise catholique" (neuvième article du Symbole), ils s'expriment ainsi :

«... suivant la remarque de saint Augustin, les Prophètes ont parlé plus clairement et plus longuement de l'Eglise que de Jésus-Christ, car ils prévoyaient qu'il y aurait beaucoup plus d'erreurs volontaires et involontaires sur ce point que sur le mystère de l'Incarnation». (Ch. Dixième).

En mettant en évidence la partie ecclésiastique de la prophétie contenue dans le Psaume XXI (sans nuire à sa partie proprement messianique) nous n'avons fait qu'appliquer l'enseignement consigné dans le Catéchisme du Concile de Trente.

(1)    Les formes verbales "obsederunt" (v.13) et "obsedit" (v.17) peuvent provenir de deux radicaux différents : soit obsidio, soit obsideo, dont les acceptions sont d'ailleurs très voisines. Les dictionnaires de concordances font généralement dériver de "obsideo" les formes verbales des v. 13 et 17.

Jean Vaquié


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